La note clinique kiné est bien plus qu’un simple résumé de séance : c’est un outil de communication, de respect et de motivation pour le patient. Bien rédigée, elle renforce la relation thérapeutique, clarifie les objectifs et soutient l’engagement du patient dans son parcours de soins. Alors, comment l’utiliser efficacement ?
🪬 Cas clinique
Camille, 34 ans, revient en consultation une semaine après son premier rendez-vous pour des douleurs lombaires. Elle vous dit : « Merci, vos notes m’ont aidée à mieux comprendre ce qu’on a vu ensemble »… avant d’ajouter : « Mais pourquoi avez-vous écrit que je « me plains » ? »
🤔 Vous pensiez bien faire. Et vous avez bien fait. La documentation clinique peut être un vrai outil de soin. Mais les mots ont un poids.
⚡ Highlights
- 🧠 +40 % de compréhension thérapeutique quand les patients relisent vos notes après la séance.
- 🧭 1 mot maladroit suffit à casser une alliance thérapeutique.
- 💬 Les mots influencent la motivation : dire “pas encore atteint” au lieu de “échec” change le parcours du patient.
- 🤝 Des notes respectueuses = plus de confiance, plus d’adhésion, moins d’abandons.
- 📋 Les patients aiment vos notes (93 % le disent)… à condition qu’elles parlent avec eux, pas sur eux.
- 🧾 Documenter, c’est soigner : chaque note est une opportunité d’éduquer, d’impliquer et de soutenir.
✨ Introduction
Les patients ne sont pas de simples destinataires passifs de leur parcours de soins : ils en sont les lecteurs, co-acteurs et parfois critiques. Avec la généralisation des « bilans et des notes en kinésithérapie » dans plusieurs pays, notamment aux États-Unis, l’accès aux notes cliniques est devenu la norme. Une évolution saluée par les patients eux-mêmes : 93 % d’entre eux estiment que relire leurs notes les aide à mieux comprendre leur état de santé, à retenir les informations transmises, et à s’impliquer activement dans leur traitement (Gerard et al., 2017 ; Walker et al., 2019).
Ce nouveau rapport au dossier médical modifie en profondeur la fonction de la documentation. Désormais, prendre des notes ne se limite plus à une obligation médico-légale : la note clinique devient un outil thérapeutique à part entière. Les patients l’utilisent comme support de mémorisation, preuve de reconnaissance, et reflet de la qualité relationnelle avec leur soignant.
Mais cette ouverture révèle aussi certains angles morts. Si la grande majorité des patients apprécie la transparence offerte par les notes, 1 sur 10 rapporte avoir lu dans son dossier des propos perçus comme blessants, stigmatisants ou simplement erronés (Cromer et al., 2017 ; Vanka et al., 2024). Des termes comme « se plaint de », « refuse le traitement » ou « non compliant » peuvent être vécus comme des jugements, et nuire à la confiance ou à l’alliance thérapeutique.
C’est dans ce contexte que Vanka et al. (2024) ont mené une étude qualitative approfondie, intégrant la voix des patients, des cliniciens et des enseignants. Leur objectif : identifier les erreurs les plus courantes dans la rédaction de notes partagées, et proposer 10 recommandations simples et concrètes pour faire de chaque note un levier d’engagement, de respect et de collaboration.
⚖️ Méthode
Pour explorer l’impact des notes cliniques sur les patients et identifier les erreurs de formulation les plus courantes, deux approches qualitatives ont été croisées : celle de Vanka et al. (2024) et celle d’un groupe de travail interdisciplinaire réuni par OpenNotes.
L’étude principale, menée par Vanka et ses collègues, repose sur quatre groupes de discussion (focus groups) totalisant 27 participants :
- 8 patients ayant accès à leurs notes via un portail de santé,
- 5 médecins en exercice,
- 7 internes en formation,
- 7 enseignants cliniques.
Chaque groupe a discuté autour d’extraits réels de notes, avec pour objectif d’explorer :
- les formulations perçues comme utiles, blessantes ou floues,
- les attentes du patient face à la documentation partagée,
- les habitudes des cliniciens lors de la rédaction.
Les chercheurs ont ensuite mené une analyse thématique inductive, permettant de faire émerger des récurrences linguistiques et relationnelles. En parallèle, le groupe de travail OpenNotes a synthétisé plusieurs années de retour d’expérience de patients ayant consulté leurs propres dossiers.
De cette double approche ont été dégagées 10 recommandations clés destinées à guider les cliniciens vers une documentation plus claire, inclusive et engageante.
📊 Résultats : Les 10 lignes directrices pour une documentation que vos patients vont aimer lire
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🧍♀️ Utilisez un langage centré sur la personne
Dites : « personne vivant avec un diabète » plutôt que « diabétique ».
Pourquoi ? Le vocabulaire centré sur la maladie renforce la stigmatisation ; celui centré sur la personne favorise le respect et la dignité. (Gerard et al., 2017)
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🏳️🌈 Respectez l’identité choisie du patient
Exemples : utiliser le prénom préféré, le pronom adéquat, ou valoriser un rôle social : « enseignante active » ou « mère de deux enfants ». Cela renforce la reconnaissance et le lien. (Vanka et al., 2024)
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🧾 Limitez les acronymes opaques
Exclure les sigles comme « SOB » (Shortness of Breath) ou « MOP » s’ils ne sont pas explicités. Pour le patient, ils peuvent être perçus comme incompréhensibles, voire inquiétants. À privilégier : des termes simples ou définis lors de l’entretien.
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📣 Ne notez rien que vous n’ayez dit à voix haute
Exemple : écrire « trouble anxieux à surveiller » sans avoir abordé le sujet avec le patient peut générer méfiance et anxiété. Transparence orale = transparence écrite (Cromer et al., 2017)
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♻️ Vérifiez l’historique avant de copier-coller
Les copier-coller peuvent entretenir des erreurs ou figer des situations dépassées. Exemple : « divorcé depuis 3 ans » alors que le patient s’est remarié. Mettez à jour les données sociales, relationnelles, professionnelles.
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🚫 Évitez les mots porteurs de jugement
Remplacez :
- « Se plaint de douleurs » → « rapporte des douleurs »
- « Refuse le traitement » → « exprime des réserves sur la proposition »
- « Non compliant » → « n’a pas encore adhéré au protocole proposé »
Ces changements réduisent le sentiment de blâme et favorisent la coopération (Goddu et al., 2018).
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👁️ Soyez objectif dans vos descriptions physiques
Exemple à éviter : « apparence négligée » (non pertinent si sans impact clinique).
Privilégiez : « présente une démarche à risque de chute », « voix basse et ralentie », si cliniquement utile. Objectivité = neutralité perçue.
8.🌱 Formulez les difficultés avec espoir et progression
Exemple : « n’a pas encore réussi à arrêter de fumer » (plutôt que « échec du sevrage »).
Cette nuance montre que le changement est possible, soutenant la motivation intrinsèque. (Walker et al., 2019)
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🔐 Traitez les sujets sensibles avec doigté
Pour les antécédents de violence, santé mentale ou consommation, préférez des formulations factuelles, dénuées de détails inutiles. Exemple : « antécédents de stress post-traumatique, en suivi » plutôt que « victime de viol dans l’enfance » (sauf nécessité clinique immédiate).
10.🧑⚕️ Exprimez vos hypothèses en première personne
Dire : « Je pense que l’anxiété contribue à ses symptômes » rend la note plus humaine et explicite le raisonnement clinique. Cela aide le patient à mieux comprendre votre posture et vos intentions.
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- ✏️ Demandez les préférences d’identité du patient (genre, nom, etc.).
- 🎓 Formez l’équipe aux biais linguistiques avec des exemples concrets à éviter.
- 🔢 Actualisez les données sociales à chaque première séance.
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Références:
- Vanka A, Johnston KT, Delbanco T, DesRoches CM, Garcia A, Salmi L, Blease C.Guidelines for patient-centered documentation in the era of open notes: qualitative study.JMIR Med Educ. 2025 Jan 20;20:11:e59301. doi:10.2196/59301.PMID: 39832175 · PMCID: PMC11791454
- Gerard M, Chimowitz H, Fossa A, Bourgeois F, Fernandez L, Bell SK.The importance of visit notes on patient portals for engaging less educated or nonwhite patients: survey study.J Med Internet Res. 2018 May 24;20(5):e191. doi:10.2196/jmir.9196.PMID: 29793900 · PMCID: PMC5992450
- Walker J, Leveille S, Bell SK, Chimowitz H, Dong Z, Elmore JG, Fernandez L, Fossa A, Gerard M, Fitzgerald P, Harcourt L, Jackson S, Payne TH, Perez J, Shucard H, Stametz R, DesRoches C, Delbanco T.OpenNotes after 7 years: patient experiences with ongoing access to their clinicians’ outpatient visit notes.J Med Internet Res. 2019 May 6;21(5):e13876. doi:10.2196/13876.PMID: 31066717 · PMCID: PMC6526690
- Goddu AP, O’Conor KJ, Lanzkron S, Saheed MO, Saha S, Peek ME, Haywood C Jr, Beach MC.Do words matter? Stigmatizing language and the transmission of bias in the medical record.J Gen Intern Med. 2018 May;33(5):685–691. doi:10.1007/s11606-017-4289-2. Epub 2018 Jan 26.PMID: 29374357 · PMCID: PMC5910343
- Bell SK, Mejilla R, Anselmo M, Darer JD, Elmore JG, Leveille S, Ngo L, Ralston JD, Walker J, Delbanco T.When doctors share visit notes with patients: a study of patient and doctor perceptions of documentation errors, safety opportunities and the patient–doctor relationship.BMJ Qual Saf. 2017 Apr;26(4):262–270. doi:10.1136/bmjqs-2015-004697. Epub 2016 May 18.

